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Splendeur de la Basilique

blasonSa construction s'étala de 1060 au XVIe siècle ; pourtant jamais on n'acheva les tours occidentales, qui figurent néammoins sur les armes de la ville, au côté du "Couvent des Jacobins".
L'édifice est d'une remarquable cohérence, puisque les constructeurs respectèrent le projet initial bien au-delà de la période romane. Par sa structure, Saint Sernin appartient à la famille des églises dites "à reliques et à pélerinages" : vaste nef flanquée de collatéraux, large transept saillant, choeur profond entouré d'un déambulatoire avec chapelles rayonnantes.

Longue de 115 mètres et large de 64 mètres (à la hauteur du transept), Saint Sernin reste le plus grand édifice roman arrivé jusqu'à nous ... et sans doute le plus exceptionnel !.
Son clocher, de plan octogonal, révèle deux étapes de construction : une étape romane, reconnaissable à ses trois niveaux d'ouverture en plein cintre ; une étape gothique, avec ses deux niveaux d'ouvertures en arc en mitre, surmontés d'une flèche sommée d'une croix dominant l'édifice à 65 mètres.
Le transept était accessible par chacun des croisillons. Seul a été conservé le double portail du croisillon sud appelé "porte des comtes", à cause de l' enfeu des comtes de Toulouse qui le flanque..
La porte Miègeville ouvre sur le flanc sud de la basilique. La porte restaurée, sur le flanc nord, donnait accès autrefois au cloître de l'abbaye. Sur la façade ouest, le corps central comprend un double portail surmonté de cinq arcs et d'une grande rose, qui aurait dû recevoir un remplage gothique si le massif occidental avait été achevé.

C'est en l'abordant du côté oriental qu'il est recommandé de découvrir le monument.
En descendant la rue Saint Bernard, depuis le Boulevard de Strasbourg, se dévoile progressivement le chevet, dominé par un imposant clocher octogonal à cinq niveaux d'arcs. Une admirable harmonie se dégage de l'étagement des masses : cinq chapelles rayonnantes, dont la chapelle d'axe plus importantes, ceinturent l'abside ; deux absidioles sont greffées à chacun des transepts,  La ceinture du déambulatoire, surmontée de l'abside majeure et du volume du choeur, élèvent le regard jusqu'à la pureté du clocher octogonal haut de 65 mètres qui couronne l'ensemble,  ainsi visible dans toute la ville.
L'harmonie du bâtiment est souligné par le contraste entre ses matériaux de construction, à l'origine en pierre blanche de calcaire extrait de la haute vallée de la Garonne (comme BOUSSENS) , en pierre verdatre extraite de carrières de marne des rives de la Garonne, au fil du temps remplacés par la brique rose toulousaine (à laquelle la ville doit sur surnom !) qui, pour des raisons de coût, devient prépondérante dans tout le bâtiment et lui donne son aura magique.

chevet

San Sarnin night

La façade occidentale, constituée par un mur pignon, est un lourd massif de briques sans ornement.
La partie basse inclut un ample portail géminé, comparable à ceux qui s'ouvrent aux extrémités du transept. Huit chapiteaux l'encadrent, historiés par le représentation de personnages et de lions prisonniers ou s'extrayant d'une efflorescence végétale. Ce portail est réputé être resté inachevé suite à l'arrêt du chantier en 1180 : des auteurs anciens le décrivent pourtant comme orné de plaques de marbre avec des sculptures en relief, disparues dans des conditions obscures à la fin du XVIe et pendant la période révolutionnaire : elles portaient des scènes associant St Saturnin et St Martial.
Certaines ont pu être retrouvées et versées au Musée des Augustins, où elles peuvent être admirées : une figure drapée du roi Antonius, un fragment de harpie piétinant un crococodile ; plus connu, sur une plaque de marbre blanc, un sagittaire et une sirène oiseau. Le plus remarquable est la représentation de deux signes du zodiaque : le signe du Lion et le signe du Bélier.
Certains, suivant David W.Scott,  positionnent entre les archivoltes (la parti moulurée entourant l'art des portes) une statue de Saint Saturnin présentant aux visiteurs un livre avec  l'inscription : "P.vobis" ; sur le "piedroit" gauche, ils placent le "roi Antoine" condamnant St Saturnin, avec la statue d'un taureau sous ses pieds. Le piédroit "droit" supporterait un bas-relief représentant Saint Martial baptisant, en présence de Saint Saturnin, baptisant la Princesse AUSTRIE, avec à ses pieds la statue du "Sagittaire" et de "la Harpie piétinant un crocodile.

Trésors de la porte occidentale de St-Sernin, disparus de la Basilique, retrouvés et reversés au Musée des Augustins

Les savants dissertent doctement, à partir d'écrits anciens, sur l'emplacement des bas-reliefs autour de la porte occidentale ; mais aucune proposition ne fait encore l'unanimité.
Au dessus du portail se développe une suite de cinq arcades moulurées en pierre et une grande rose sans remplage s'inscrit sous un arc de brique ébrasé vers l'extérieur. Elle fut terminée vers 1220 et resta inachevée jusqu'au XXème siècle : la tour nord présentait un déséquilibre assez disgracieux, celui-ci a été corrigé (sans reprendre les plan d’achèvement conçu par Viollet-Le-Duc). 

Jamais achevée, la façade occidententale était dissymétrique et peu agréable ; le projet de VIOLLET-le-DUC était de l'achever, en la dotant enfin de ses deux tours. Si la hauteur des deux tours fut réalignée lors de la campagne de travaux de restauration 1927-1929, le projet d'achèvement ne put aboutir.

septentrion

Au-cours des siècles, le côté nord de la Basilique avait reçu des rajouts, pour permettre aux moines séculiers qui assuraient le service de s'y établir ; c'est ainsi qu'une abbaye avait êté rajoutée à la face nord, comprenant en outre la maison de l'Abbé, les pièces communes et un cloître. Elle était cloturée d'un haut mur, comme en atteste le magnifique portail en pierre qui a été conservé devant la Porte Miègeville.
La campagne de piétonisation et végétalisation de la Place Saint-Sernin, écrin de la Basilique, qui a duré quatre ans, entre 2015 et 2019, a permis de mener à bien d'importantes fouilles archéologiques qui ont permis de situer avec exactitude l'implantation des anciens bâtiments monastiques, du cloître et du logis abbatial. Afin de les sauvegarder, le sol a été réhaussé et sur le nouveau revêment en porphyre gris, leur emplacement est exactement figuré.
La première communauté de chanoines est en effet présente depuis 844 sur cette place ; c'est de sa volonté et de son action qu'est issue la Basilique.
L'abbaye et son cloître furent détruits lors d'une campagne de démolition, menée de 1804 à 1808. Des chapiteaux de ce cloître qui furent sauvegardés sont visibles au Musée des Augustins.

 

saint sernin cloitre light  basilique north fusain

 

sud sarnin

Porte des Comtes

Dirigeons-nous vers le croisillon sud du transept. Le double portail formant la "porte des comtes" présente un ensemble de chapiteaux caractéristiques des premiers balbutiements de la sculpture romane, puisque antérieurs aux années 1082-1083. Nous sommes là face au plus ancien portail de la Basilique ; il comporte deux baies jumelles, avec des portails inspirés de ceux des villes romaines, qui donnent accès au transept. Trois reliefs en ornent la façade au-dessus des portes : au centre, le plus important, encadré par deux lions, a été buriné pendant la révolution ; il a conservé sur son arcade la gravure : "Sanctus Saturninus", indiquant qu'elle comportait une représentation du saint Patron de la Basilique, Saint Saturnin ; ceux des extrêmités ont également été détruits.

Les colonnes qui encadrent le portails se terminent par des chapiteaux historiés mettant en scène damnation et salut de l'âme, version médiévale du vice et de la vertu.

Ces chapitaux historiés sont très anciens, car antérieurs aux années 1082-1083 :

  • La plus célèbre est celui de "Lazare et du mauvais riche" ; le riche est assis à sa table et mange sans la moindre attention pour son entourage ; Lazare se trouve à sa gauche, affamé, appuyé sur un bâton. Seuls des chiens qui lui lèchent les pieds lui montrent de l'intérêt.
  • Sur la suivante, l'âme de Lazare, sauvée, figure dans une mandorle que deux anges élèvent : il a gagné la vie éternelle.

Les suivants concernent les péchés et les vices, les tourments éternels que subiront ceux qui se rendent coupables des péchès capitaux :

  • l'avare est pendu avec une énorme bourse lestant son cou ;
  • deux serpents mangent les seins nus de la femme luxurieuse ;
  • un monstre à une tête et deux corps mange la tête d'un damné coupable d'abus de nourriture et de boisson ;
  • deux démons triturent avec une sorte de fourche la bas-ventre de l'homme luxurieux.
  • Sur la colonne centrale, une scène énigmatique :
  • un homme assis, tenant un bâton se termiant en volute, essaie de se lever ; deux personnages semblent le soutenir en tenant ses avant-bras levés.

A gauche de la "Porte des Comtes", dans une niche du mur de la Basilique, l'ENFEU des Comtes de Toulouse ; l'Enfeu est un sarcophage, ou un ensemble de sarcophages, encastré dans le mur d'un édifice religieux, généralement réservé à la noblesse. Ceux de St Sernin, très dégradés, ont été remplacés par des moulages et sont maintenant présentés à l'intérieur de la Basilique ; ils contenaient la dépouille des Comtes de Toulouse Guillaume Taillefer (1030) et de son fils, Pons III.

L'actuelle Place Saint-Sernin, située hors les murs romains, était dans l'antiquité l'emplacement d'une nécropole ; la tradition perdura lors des premies siècles chrétiens, et toutes les fouilles effectuées ont retrouvé leurs traces. D'ailleurs, certains ont été utilisés en remplois : dans un contrefort de la façade méridionale du croisillon sud du transept, figurent trois fragments de sarcophages paléochrétiens. Ils représentent des scènes pastorales et de chasse.

La Porte Miegeville (1110-1115) est situé sur la face sud de l'édifice, dans l'axe de la rue du Taur, qui avec la rue de Rome constituait depuis la Place Esquirol, centre de la Cité romaine, l'axe nord - sud qui coupait la ville en son milieu, reprenant le tracé de l'ancienne voie romaine, le "cardo maximus", que parcourut le taureau furieux traînant depuis le forum (actuelle Place Esquirol) le corps attaché et désarticulé de St Satunrin, jusqu'à la rue du Taur, au niveau actuel de l'Eglise éponyme.

porte miegeville 1832
Représentation de la Porte Miegeville en 1832

Bien que dotée d'un seul portail, elle constitue de par son positionnement, l'entrée principale de la Basilique, la seule comportant également un tympan et un linteau historié. Elle doit son nom à ce positionnement, "Miègeville" étant la transposition de son nom occitan "Miéja Vila" qui la situait face à la rue qui parcourait le Centre Ville.

sarnin access512Elle est précédée de l'avant-porte renaissance, qui est l'unique vestige demeurant de l'ancienne abbaye greffée à la Basilique ; elle est de style renaissance, mais était très dégradée et sale au XIXe siècle, de telle sorte que les travaux de restauration de Viollet-le-Duc : couronnement d'un fronton triangulaire à la place du semi-circulaire en place jusque là, reconstitution de la sculpture du tympan en motifs floraux (plateresque).

Sur les quelques mètres séparant les deux portes, bordées par des grilles forgées, quelques pannonceaux pour renseigner les visiteurs, notamment celui de l'UNESCO informant que ce bâtiment est classé sur la liste des chefs d'oeuvre de l'humanité au titre des Chemins de Compostelle

Le tympan l'un des premiers de l'art roman, classé en raison de représente l'Ascension de Jésus-Christ, représente la part céleste de l'oeuvre ; entouré de six anges, le Christ est le personnage central, le plus grand. Il est debout, mains levées, sa tête auréolée regardant vers le ciel est dissimulée par les nuées. Soutenu par deux anges, il a déjà quitté la terre et se trouve déjà au royaume céleste. La présence des six anges témoigne de sa divinité : de part et d'autre de Jésus, deux anges l'élèvent ; les deux suivants, aux grandes ailes, profondément recueillis l'accompagnent de leur regard et du geste de leurs bras ; les deux recroquevillés dans les coins l'acclament.

miegeville redresse 1

Le linteau est la part terrestre et complémentaire de l'oeuvre : à chacune des ses extrêmités, deux anges coiffés d'un bonnet pointu encadrent les douze apôtres compagnons du Christ ; ils les encouragent  pour apporter sur la terre entière la nouvelle de la Résurrection du Christ. Les douze apôtres ont le visage tourné vers le ciel et assistent à l'Ascension, marquant leur surprise par des gestes sujectifs qui traduisent leur émotion.

Tympan Porte Migeville
 
Le linteau est porté par deux consoles latérales où l'on voit, à gauche, le roi David musicien et psalmiste, et, à droite, deux personnages maîtrisant des lions.

 

A chaque extrêmité, le linteau est soutenu par des consoles dont la face interne a été historiée :

  • Celle de gauche représente le roi David, en musicien barbu et couronné, tenant dans sa main gauche un instrument à cordes et dans la droite un archet ; il est assis sur deux lions qui se croisent en X dans son dos, et dont les gueules ressortent de chaque côté de ses épaules. Celui-ci est le souverain idéal, symbôle du pardon et du rachat ; il a commis une grande faute (adultère avec Bethsabée), mais il s'en est confessé et a montré le restant de sa vie qu'il s'agissait d'une erreur passagère ! Il est donc également symbôle du pardon.
  • Celle de droite est plus énigmatique :  deux anges à visage pouppin, coiffés d'une sorte de bonnet phrygien (comme ceux du linteau), chevauchent chacun un lion dont ils ramènent avec leur bras la tête sur leur genou. Chacun a un pied chaussé, l'autre nu.

    Pour beaucoup de commentateurs les deux linteaux sont complémentaires ; les lions symbolisent le mal que le Roi David et les Anges combattent et jugulent.

 

En tête de colonnes, ils sont historiés :

  • Annonciation et visitation :

    Marie, cheveux voilés, un bras plié, l'autre tendu, mais paumes ouvertes accepte l'annonce que l'Ange Gabriel, que l'on reconnait à ses ailes et à la croix qu'il porte, vient de lui signifier comme quoi elle a été choisie comme Mère de Jésus-Christ, fils de Dieu. C'est l'Annonciation.
    Sur l'autre face du même chapiteau, elle étreint sa cousine Elisabeth, enceinte de Jean-Baptiste, en présence d'un ange qui porte une croix et un livre ; c'est la "Visitation"..

  • Le massacre des innocents :

    Sur une face, un soldat tient dans une main son glaive et dans l'autre la tête d'un enfant qu'il s'apprête à massacrer ; sur l'autre face, d'autres mères dans l'affliction amènent leur nouveau-né qui va être sacrifié pour satisfaire la volonté du roi Hérode, auquel ses mages ont annoncé la naissance du Roi des Juifs, qui fait tuer les nouveaux nés pour éliminer tout rival éventuel. Jésus, sur l'initiative de Joseph, sera conduit en Egypte, pour échapper à ce massacre.

  • Expulsion d'Adam et Eve du Paradis terrestre :

    Nus, un homme et une femme qui tentent de cacher leur nudité avec une feuille de vigne, et symbôlisent Adam et Eve chassés de l'Eden pour avoir mangé le fruit de l'arbre de la connaissance. D'abord Eve, tentée par le serpent, puis Adam ; Eve représente le "mal" pour les chrétiens de cette époque.

De chaque côté, tympan et linteau sont encadrés d'une grande statue.

PetrusC'est la statue de droite, facilement reconnaissable car son nom est gravée ; il bénit de la main droite il porte le trousseau de clés, symbole pour les chrétiens du royaume des cieux. Jésus lui a confié la direction de la future église ; son oeuvre missionnaire l'a conduit jusqu'à Rome, où il fut martyrisé sous Néron.

Un bas relief au-dessus de sa tête représente deux Anges, porteurs d'une couronne, présentant des hosties crucifères, symbôles du pouvoir que lui a confié Jésus Christ.

Sous ses pieds, Simon le Magicien, assis sur un fauteuil que deux démons effrayants, tentent vainement d'envoyer vers le ciel ; mais Simon le Magicien n'accèdera jamais à l'ascension : il a été condamné par Pierre auquel, après son baptême chrétien, il avait voulu acheter le pouvoir de faire des miracles. Il a donné son nom à la "simonie", qui est le fait de vendre des biens religieux contre des biens temporels, fortement condamnée par la réforme grégorienne.

PaulusLa statue de gauche représente Saint Jacques le majeur, dont la présence manifeste l'importance du pélerinage à Compostelle ; son nom est gravé sur le limbe et il porte les Evangiles. Persécuté par Hérode, il fut martyrisé et son corps arrivé en Espagne et inhumé à Saint Jacques de Compostelle est à l'origine du Pélerinage qui enflamma la chrétienté durant plusieurs siècles et dont la Basilique Saint Sernin constituait l'une des étapes les plus glorieuses.

Le sens de la plaque qui le surmonte est encore indécise : deux hommes assis face à face semblent prisonniers d'un "rinceau" de feuillages.

La plaque en-dessous n'est guère plus compréhensible : deux femmes sont assises, chacune sur le dos d'un lion qui sont positionnés dos à dos, dans des directions opposées ; derrière elles, un homme, assis également, les bras ouverts tient avec ses mains leurs têtes qu'il semble vouloir rapprocher et rassembler. Pour certains spécialistes, le Patriarche serait Abraham, les deux femmes ses épouses Sarah et Agar, symbôles de l'ancien et du nouveau testament, qui se scrutent l'un l'autre pour se révéler complètement. Le trio incarne le fondement de la chrétienté, et rappelle l'accomplissement de l'ancien testament par le nouveau, que Jésus est bien le messie.